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Le sein avant l’âge adulte

JF. Chateil, F. Arboucalot, P. Pietrera, M. Boisserie-Lacroix

La pathologie mammaire est rare chez l’enfant et l’adolescente. L’imagerie du sein, dans cette tranche d’âge repose essentiellement sur l’échographie. A l’âge pédiatrique, au niveau du sein, l’histoire clinique, les signes échographiques sont souvent évocateurs d’un diagnostic. La mammographie réalisée en deuxième intention chez la jeune fille n’est indiquée que devant une lésion solide hétérogène évolutive, sans diagnostic précis en échographie. L’étude par cytoponction est licite dans ce cadre. il faut éviter les biopsies durant les premières années de vie lorsqu’elles ne sont pas strictement nécessaires, car elles peuvent induire une hypoplasie mammaire secondaire.
La démarche que nous présentons ici est un guide pour les radiopédiatres qui sont parfois confrontés à ce type de pathologie. La confrontation avec un spécialiste rompu à la pratique de la sénologie chez l’adolescente est nécessaire en cas d’incertitude.
1. Embryologie et développement
Les glandes mammaires sont dérivées des crêtes mammaires qui apparaissent vers la 6e semaine de vie intra-utérine. Ce sont des épaississements ectodermiques qui s’étendent du creux axillaire jusqu’à l’aine suivant deux lignes symétriques situées le long des parties latérales du tronc. Ces crêtes vont rapidement régresser sauf au niveau du thorax. A la 8e semaine, il ne persiste qu’un petit épaississement: le bourgeon mammaire. Les cordons cellulaires s’enfoncent dans le mésenchyme et donnent naissance aux bourgeons primaires puis secondaires. Ces formations vont se canaliser vers le 8e mois. A la fin de la vie fœtale, l’épiderme glandulaire se déprime et constitue la dépression épithéliale du futur mamelon sur laquelle viennent s’ouvrir les canaux. Le mamelon est formé durant la période périnatale par la prolifération du mésenchyme sous aréolaire, l’aréole correspondant à la zone cutanée circulaire entourant le mamelon. Le tissu conjonctif fibreux et la graisse de la glande mammaire se développent à partir du mésenchyme.
A la naissance, la glande mammaire “rudimentaire” est identique chez le garçon et la fille. Elle peut donner des signes de sécrétion. le « lait de sorcière » (il existe une véritable hypertrophie de la glande mammaire). Ce phénomène serait dû au passage de prolactine maternelle dans la circulation fœtale par voie transplacentaire. La régression incomplète des crêtes mammaires peut laisser persister des mamelons surnuméraires (polythélie) ou des glandes surnuméraires (polymastie). On peut observer les polythélies chez environ 1% de la population féminine; elles sont généralement héréditaires. Les glandes mammaires accessoires (considérées au Moyen-Age comme des marques de sorcellerie) peuvent posséder un tissu normal et même fonctionner durant la lactation. Une intervention chirurgicale ne sera réalisée que si la gêne esthétique est importante ou s’il existe une douleur, notamment du fait de la localisation (creux axillaire). Avant la puberté, la glande mammaire subit une croissance très lente par ramifications successives de galactophores. Le sein pré-pubère est rudimentaire, caractérisé par l’absence de structures acino-lobulaires.
A la puberté, le développement des caractères sexuels secondaires et en premier lieu des seins est un critère fondamental de l’évaluation pubertaire qui a été décrit par Reynolds et Tanner. Il comporte 5 stades:
- S1. stade infantile
- S2. saillie mamelonnaire avec élargissement de l’aréole
- S3. accentuation de la saillie avec aréole et sein sur le même plan
- S4. aspect piriforme des seins avec aréole saillante
- S5 seins de type adulte.
Le développement mammaire est antérieur à l’apparition des premières menstruations. Les canaux pédiculisent les lobules et réalisent l’unité terminale ducto-lobulaire. La glande mammaire est composée d’une quinzaine de lobes, chaque lobe est drainé par un canal galactophore principal s’ouvrant au niveau du mamelon. L’approche clinique, pour importante qu’elle soit, ne peut se passer d’une écoute de la jeune fille. Les retards de croissance ou les asymétries sont sources d’angoisse. L’exploration en imagerie est différente de celle de la femme adulte.

2. Approche diagnostique
2.1 Circonstances de l’examen
2.1.1. Avant la puberté :
Les situations les plus fréquentes sont la survenue d’un développement mammaire prématuré voire d’une véritable puberté précoce, une asymétrie de développement des bourgeons mammaires, une douleur spontanée ou après un traumatisme, une anomalie de l’aréole.L’interrogatoire se fait en présence de la mère. L’examen clinique fait appel avant tout à l’inspection. La palpation douce apporte rarement des éléments complémentaires. Les explorations en imagerie sont exceptionnelles.
- 2.1.2. A la période péri-pubertaire :
Les motifs de consultation sont la découverte d’une masse mammaire, une anomalie morphologique, des douleurs. L’examen clinique associe inspection et palpation et doit être rassurant vis à vis de la jeune fille. Il permet de juger de l’état cutané, de la morphologie des seins et des aréoles, de l’existence d’une masse mammaire. Il apprécie également les aires ganglionnaires, la morphologie du thorax et la statique rachidienne.
Sur le plan des explorations, l’échographie est l’examen à réaliser en première intention (1-3). Le bourgeon mammaire, prélude au développement de la glande, est visualisé à l’adolescence sous la forme d’un nodule hypoéchogène. Le développement mammaire peut être asymétrique. il existe des poussées mammaires prépubertaires unilatérales qui peuvent être à l’origine d’une sensibilité rétro-mamelonnaire. La mammographie à cet âge montre des seins hyperdenses peu analysables (4).

3. Hypoplasie et agénésie mammaire, syndrome de Poland
3.1.Le syndrome de Poland
C’est un ensemble malformatif associant d’un même côté (5):
- une agénésie du faisceau sternocostal du grand pectoral avec parfois une aplasie du petit pectoral ;
- des anomalies de la paroi thoracique (hypoplasie chondrocostale) ;
- une scoliose ;
- une hypoplasie du membre supérieur prédominant sur le segment distal ;
- des anomalies de la main. clinodactylie, brachydactylie, brachyméso-phalangie, syndactylie ;
- une aplasie mammaire pratiquement constante chez la fille. On peut noter une athélie ou une hypoplasie du mamelon.
L’étiologie n’est pas précisée. Des anomalies associées ont été décrites, en particulier une agénésie rénale (6). Ce syndrome prédomine du côté droit et les hommes sont plus fréquemment atteints. Chez la jeune fille, les conséquences esthétiques et psychologiques appellent une chirurgie de plastie mammaire. L’intervention n’est réalisée qu’à la maturité du sein controlatéral. une prothèse mammaire peut être envisagée.
Le scanner et l’I.R.M. peuvent être utiles dans le bilan pré-opératoire afin de préciser les anomalies musculaires (l’état du grand pectoral influence l’approche chirurgicale). Des coupes transverses au niveau thoracique sont préconisées.
3.2. Autres causes d’hypoplasie ou d’agénésie mammaire :
Certains facteurs compromettent le développement harmonieux du sein :
- un traumatisme important, une brûlure majeure ;
- la radiothérapie thoracique. une dose de 26,4 Gy entraînerait une hypoplasie mammaire, une dose de 39,8 Gy une agénésie mammaire (7).
- toute chirurgie thoracique lésant l’ébauche mammaire. biopsie mammaire, thoracotomie, mise en place d’une chambre implantable ;
- l’invasion par un angiome du bourgeon mammaire. L’angiome mammaire de la fillette est une tumeur bénigne rare dont la régression est spontanée, mais il y a un risque d’hypoplasie mammaire si l’angiome englobe le bourgeon mammaire. L’I.R.M. permet d’étudier les rapports de l’angiome avec le bourgeon mammaire. Sur les coupes axiales transverses pondérées en T2, l’angiome apparaît hyper-intense et le bourgeon mammaire hypo-intense. Un traitement par corticoïdes pourra être proposé pour éviter l’hypoplasie mammaire (8).

4. La prémature thélarche
C’est la cause la plus fréquente de « pathologie mammaire » rencontrée chez la petite fille. Le développement prématuré des seins peut être bilatéral et symétrique, asymétrique ou parfois unilatéral (le diamètre de la glande mammaire est supérieur ou égal à 30 mm). il est isolé. On ne note aucun autre caractère sexuel secondaire, ni aucun signe en faveur d’une puberté précoce :
- absence de développement du mamelon et d’élargissement de l’aréole ;
- absence de modification morphologique ;
- les organes génitaux sont de type infantile ;
- absence de pilosité.
Dans 50% des cas, on retrouve l’existence d’une crise génitale en période néonatale. Le taux d’oestrogènes et de gonadotrophines plasmatiques est normal.
L’hypertrophie mammaire peut persister ou régresser. La régression spontanée complète est fréquente quand le diamètre de la glande n’excède pas 5 cm (plus le début est tardif, plus la régression est rapide).
Le bilan d’imagerie comprend essentiellement une échographie pelvienne et rénale à la recherche d’une tumeur surrénalienne ou ovarienne et permettra de vérifier l’aspect impubère de l’utérus (le col étant plus développé que le corps) (9). Dans le cas contraire, le bilan est différent et doit être celui de toute puberté précoce .

5. L’adénofibrome
5.1. L’adénofibrome unique
L’adénofibrome (nommé par Charles GROS “la tumeur de la fiancée”) est la tumeur bénigne la plus fréquente chez les jeunes filles de moins de 25 ans (10). Il s’observe plutôt chez les jeunes filles pubères qu’en période prépubertaire. Histologiquement, la prolifération intéresse le tissu épithélial canaliculaire et le stroma fibreux lobulaire.
Du point de vue évolutif, l’adénofibrome peut soit rester stable, soit augmenter de taille (notamment lors des grossesses), soit régresser spontanément.
En échographie, l’adénofibrome correspond à un nodule hypo-échogène avec un renforcement postérieur. (ce dernier n’est présent que dans 40% des cas). Les contours sont réguliers. Cette masse bénigne présente un grand axe parallèle au plan cutané avec un rapport L sur e supérieur à 1,4 dans 86% des cas (11). Des zones d’infarctus intra-tumoraux peuvent survenir et donner des calcifications séquellaires (mais cet aspect est rare chez l’adolescente).
Actuellement, une chirurgie d’exérèse est conseillée par certaines équipes chirurgicales vers 25 ans ou 30 ans, voire plus tôt en cas de masse volumineuse (12).
5.2. L’adénofibromatose
Cliniquement, l’adolescente se présente avec des nodules multiples des deux seins, fermes, mobiles, indolores. Les adénofibromes peuvent être multiples et bilatéraux dans 10 à 20% des cas. Ils sont plus fréquents dans la race noire.
Une surveillance clinique et échographique est instaurée. On n’intervient chirurgicalement que pour les masses volumineuses qui entraînent une gêne. Si la jeune fille est sous contraceptif oral, on peut proposer une pilule à climat progestatif.
5.3. L’adénofibrome juvénile
L’adénofibrome juvénile survient à l’adolescence, généralement entre 14 et 19 ans. Sa fréquence est estimée à 4% de l’ensemble des adénofibromes.
Cliniquement, il existe une augmentation rapide et douloureuse du volume mammaire. On palpe un nodule ferme, le plus souvent unique, moins volontiers multiple.
L’aspect échographique peut être celui d’un adénofibrome classique ou celui d’un nodule hétérogène. Le Doppler couleur montre les pédicules vasculaires témoins d’une importante angiogénèse. Son apport est controversé.
Le diagnostic différentiel se pose avec la tumeur phyllode et une tumorectomie est toujours décidée. A l’intervention, la tumeur est bien encapsulée. Les lames examinées montrent une prolifération des structures acino-galactophoriques et une hyperplasie du stroma palléal, concluant à l’adénofibrome juvénile.

6. Le kyste rétro-aréolaire de l’adolescente
Les kystes rétro-aréolaires de l’adolescente sont réputés rares, mais un certain nombre est méconnu car asymptomatique. Sur le plan anatomique, il existe des glandes sébacées aréolaires centrales qui ne sont pas associées à un follicule pileux mais à de petites glandes mammaires accessoires. Le sébum est ainsi libéré dans un petit canal galactophorique provenant de lobules mammaires accessoires plus profondément situés sous l’aréole. Ce canal commun s’ouvre à la surface de l’aréole au centre d’un tubercule de Montgomery. A partir de ces glandes de Montgomery peuvent se développer des kystes rétentionnels dont la pathogénie est mal connue.
Cliniquement, les kystes rétro-aréolaires s’expriment par 3 symptômes isolés ou associés nodule, douleur et écoulement aréolaire (13). Ils peuvent être silencieux et souvent on découvre à l’échographie un kyste contro-latéral asymptomatique.
Echographiquement, ces kystes correspondent à une image liquidienne arrondie ou ovalaire ou de type lobulaire. Le caractère douloureux et la paroi épaissie traduisent le caractère inflammatoire.
L’évolution spontanée se fait vers la disparition; il existe rarement une récidive. Un traitement antibiotique anti-inflammatoire peut être proposé.

7. L’ectasie galactophorique
Contrairement à des notions anciennes, l’ectasie galactophorique peut s’observer chez la fillette et l’adolescente. L’hypothèse actuelle est celle d’une maladie auto-immune à médiation cellulaire. Sur le plan anatomopathologique, il existe au début une dilatation simple des canaux sans altération des parois, ni de l’épithélium (phase asymptomatique).
Cliniquement, elle peut soit être asymptomatique, soit se révéler par un écoulement séreux ou verdâtre, ou par une mastite. Des cas de régression spontanée ont été reportés (14).
A l’échographie, il existe une dilatation des canaux galactophoriques supérieure à 3 mm.
L’évolution peut se faire vers la mastite à plasmocytes avec d’éventuelles poussées inflammatoires infectieuses (abcès avec pus stérile ou microbien) ou bien vers la régression.

8. Les abcès du sein
Chez le nouveau-né, l’abcès mammaire fait souvent suite à la crise génito-mammaire néonatale et survient dans les trois premières semaines de la vie. Les manipulations de la région mammaire favorisant ces abcès, l’expression manuelle du “lait de sorcière” ne doit pas être pratiquée.
Chez la fillette plus âgée et l’adolescente, l’abcès survient par surinfection d’une ectasie galactophorique ou d’un kyste rétro-aréolaire. Une éventuelle fistule peut favoriser les récidives. L’abcès du sein peut correspondre plus rarement à un embol septique à partir d’un foyer lointain et à l’extension d’une infection cutanée.
Cliniquement, le sein est rouge, chaud, douloureux. Quand l’abcès est collecté, on peut palper une masse fluctuante. Les signes généraux et l’écoulement purulent sont inconstants. Lorsque ce dernier est présent, un examen cytobactériologique peut être réalisé. Les germes les plus fréquemment retrouvés sont le staphylocoque doré, le streptocoque et l’Escherichia Coli.
Echographiquement, au début, l’inflammation se traduit par une zone hétérogène mal limitée, avec parfois une atténuation du faisceau.
Au stade collecté, l’image est celle d’un kyste à contours épais ou à paroi épaissie avec un renforcement postérieur. Il est possible de visualiser des amas hyper-échogènes. On peut également observer des collections hypo-échogènes (15).
Le risque est l’évolution vers la cellulite qui sera prévenue par une antibiothérapie systématique adaptée à un antibiogramme réalisé sur le liquide d’écoulement ou sur le liquide de drainage. Certains auteurs préconisent un drainage chirurgical par une incision radiée ou périaréolaire. Lors d’abcès récidivants, la recherche d’une fistule et son excision seront réalisées.

9. La mastopathie fibro-kystique
La maladie fibrokystique est un terme contesté. Elle associe des lésions kystiques, de fibrose, d’hyperplasie épithéliale lobulaire, d’adénose sclérosante. Les kystes mammaires se développent à partir d’une dilatation des canaux intra-lobulaires. Sa fréquence est d’environ 10% des tuméfactions mammaires avant 20 ans.
Cliniquement, l’adolescente ressent des mastodynies pré-menstruelles à type de pesanteur. Des kystes peuvent être palpés ; leur tension est parfois telle qu’ils peuvent être confondus avec des masses solides et l’échographie est indispensable pour le diagnostic. Si un doute persiste, une aspiration à l’aiguille sera effectuée. Au cours du cycle et d’un cycle à l’autre, la taille et le nombre des kystes sont variables.
A l’échographie, Il existe de nombreux nodules ovalaires transsoniques, aux contours réguliers et présentant un renforcement postérieur dont l’aspect est typique de kystes.
La majorité de ces jeunes filles présente une insuffisance lutéale. Un traitement par une pilule œstro-progestative à climat progestéronique peut être proposé.

10. La papillomatose juvénile
La papillomatose juvénile est une entité anatomo-clinique particulière, décrite par ROSEN pour la première fois en 1980; elle touche dans 70% des cas des jeunes filles de moins de 25 ans présentant un pourcentage élevé (environ 30%) d’antécédents familiaux de cancer du sein. Cette affection rare constitue un marqueur de risque familial ou individuel de cancer du sein (16, 17).
Macroscopiquement, la tumeur se compose de nombreux kystes avec une lumière encombrée de sécrétions au sein d’un tissu dense. Microscopiquement, on observe des kystes bordés d’un épithélium aplati avec une métaplasie papillaire apocrine et une hyperplasie floride de l’épithélium canalaire. il peut s’y associer des lésions d’adénose floride ou sclérosante ainsi que des microcalcifications.
Cliniquement, on palpe une masse douloureuse, ferme du sein, qui peut s’accompagner parfois d’un écoulement mamelonnaire et qui est unilatéral.
L’échographie retrouve une lésion hypoéchogène avec des zones kystiques périphériques; la mammographie montre des microcalcifications.
Seule la biopsie assure le diagnostic.
Le traitement est fonction de plusieurs paramètres: S’il s’agit d’une lésion localisée, qu’il n’existe pas d’antécédent familial de cancer du sein, une segmentectomie large est réalisée avec une surveillance attentive. Si l’histologie montre des lésions diffuses et atypiques, que l’ensemble de la plage mammaire est ponctué de microcalcifications, il faut discuter l’opportunité d’une mastectomie sous-cutanée avec prothèse d’emblée.
Etant donné l’incertitude du pronostic, une surveillance des deux seins tous les 2 ans est instaurée. Un dépistage chez les parents proches devra être institué.

11. La tumeur phyllode
C’est une tumeur rare survenant le plus souvent dans la quatrième décennie. Seule une cinquantaine de cas ont été publiés chez l’adolescente. Il n’existe pas de critère absolu pour juger de la bénignité ou de la malignité des tumeurs phyllodes, le seul critère de malignité absolue demeurant la présence de métastases (ganglionnaire, pulmonaire et hépatique).
Cliniquement, c’est une tumeur qui augmente rapidement de taille, polylobée, mais qui peut également avoir les caractères d’un adénofibrome banal (18, 19).
A l’échographie, l’aspect peut être similaire à celui décrit dans l’adénofibrome juvénile, mais il faut noter la possibilité de zones liquidiennes intratumorales.
L’examen anatomo-pathologique affirme le diagnostic. Une tumorectomie élargie est nécessaire pour éviter les récidives et semble suffisante chez l’adolescente, la survenue de métastases étant exceptionnelle à cet âge.

12. Le cancer mammaire
Le cancer mammaire de la fillette et de l’adolescente est exceptionnel (une cinquantaine de cas ont été publiés dans la littérature) (20).
Cliniquement, c’est la découverte d’un nodule (mobile ou adhérent à la peau), d’un écoulement ou d’une rétraction du mamelon qui révèlent la tumeur. Il existe souvent un retard dans la réalisation de la biopsie mammaire et donc du diagnostic car la crainte de compromettre le développement du sein est toujours présente.
Le type le plus fréquent est le carcinome juvénile sécrétant dans le cytoplasme des cellules tumorales, on note la présence d’un matériel PAS positif, homogène, éosinophile. Cliniquement, il existe une masse palpable, mobile, circonscrite. Le pronostic est favorable par l’évolution surtout locale sans tendance à la généralisation. Une tumorectomie avec examen extemporané est suffisante comme traitement (21, 22).
Le carcinome lobulaire in situ intéresse les canalicules intralobaires. Il est exceptionnel avant 20 ans, et n’a pas de traduction clinique ou radiologique et il est considéré comme un état pré-invasif.

13. Les métastases mammaires
Les métastases mammaires sont rares chez l’adolescente. Elles surviennent soit par voie hématogène, soit par voie lymphatique. Les tumeurs primitives les plus fréquentes sont les lymphomes non hodgkiniens, les rhabdomyosarcomes, les leucémies (23-27). Plus rarement, les histiocytoses et les médulloblastomes peuvent donner des localisations secondaires dans le sein.
L’aspect échographique des métastases a été rarement décrit dans la littérature. Des nodules hypo-échogènes peuvent être visibles en échographie. Nous avons observé chez cinq adolescentes des nodules hétérogènes dont le grand axe est parfois perpendiculaire à la peau. L’aspect échographique n’est pas spécifique. Cependant, l’échographie est indispensable pour attirer l’attention sur des images qui ne correspondent pas à une pathologie à priori bénigne. Elle peut être utile lors d’une cytoponction.
La mammographie dans 2 de nos 5 cas ne retrouve pas de micro-calcifications et montre des seins denses peu analysables. La biopsie reste l’examen de dernière intention et affirme le diagnostic de métastases.

14. Conclusion
Les principaux diagnostics à envisager en présence d’une lésion mammaire survenant chez une fillette ou une adolescente ont été revu dans ce cours. La bénignité est la règle mais il faut connaître la possibilité de lésions malignes, en particulier d’origine métastatique.
L’examen de première intention est l’échographie, accessible pour le radiopédiatre ; en fonction du tableau clinique, des résultats, une orientation diagnostique pourra être envisagée. Au moindre doute, une consultation spécialisée peut permettre de préciser ce diagnostic. La biopsie mammaire, source d’hypoplasie, sera réalisée en seconde intention.

15. Références :
L’essentiel de ce texte est issu du livre de référence de M. Boisserie-Lacroix. Sénologie de l’enfant et de l’adolescente. Flammarion, Paris, 1998.

Autres références citées dans le texte :
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